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Mister K
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6 février 2005

Jorn Riel

On ne passe pas impunément son enfance sur les genoux de Knud Ramunssen ou la jambe de bois de Peter Freuchen à écouter les récits de ces deux là: ça laisse des traces. C'est au domicile familial, à deux pas du Nyhavan à Copenhague que le petit Jørn Riel s'est construit son imaginaire. Son père, coiffeur attitré de la Cour Royale de Danemark, préférait à sa charge et à ses ciseaux les longues conversations avec ces pionniers scandinaves de la recherche arctique. Et quoi de plus naturel, pour qui a vécu, au travers de ce qu'en disent les autres, les glaces et les chasses de l'arctique,  que de s'engager dès que possible dans les expéditions du Docteur Lauge Koch pour le Nord Est du Groenland? Nous sommes en 1950, il a dix neuf ans. Il y restera seize ans. Du fatras des glaces et des aurores boréales, il rapportera une bonne vingtaine d'ouvrages.
Le versant arctique de l'oeuvre de Jørn Riel ( dédié pour une part à Paul Emile Victor / les deux hommes se sont cotoyés sur l'île d'Ella / pour l'autre à Nugarssunguaq, la petite fille groenlandaise de Jørn Riel est progressivement accessible au lecteur francophone ). Il est d'abord constitué de la série des racontars arctiques, suite de brèves ayant toujours pour héros, ou anti­héros magnifiques,  les mêmes trappeurs du Nord Est Groenlandais, paumés hâbleurs, écrivains de pacotille, tireurs myope, philosophe de comptoir devant un tord­boyaux imbuvable, bourrus bienveillants, amoureux de cet être cruellement absent de la banquise, la femme.
Au delà du rire, parce que ces livres sont de nature à dérider les plus mélancoliques, c'est bien toute une nouvelle vision du monde que nous offre Jørn Riel. Celui qui a vécu dans le désert, désert de sable ou de glace sait aller à l'essentiel. Puis il y a le cycle " le chant pour celui qui désire vivre ". Jørn Riel brosse là une fabuleuse fresque ethnologique du peuplement inuit du Groenland.

La forme romanesque adoptée permet de pénétrer au coeur même de l'imaginaire inuit: nous ne voyons pas seulement les personnages, nous vivons au milieu d'eux. Avec Heq, qui en l'an 1000 mène son peuple sur la terre promise et fonde Thulé, avec Arluq qui entreprend 500 ans plus tard de faire le tour des merveilleux mondes ( le Groenland, son seul univers ), avec Soré, sa descendante, notre contemporaine qui, après une phase de désarroi due à la colonisation, retrouve un espoir dans l'inuité.

  Auteur à l'immense popularité en Scandinavie, traduit en une douzaine de langues, Jørn Riel joint sa voix à celles, si uniques et émouvantes de Paul­Emile Victor et de Jean Malaurie, comme un gai savoir.

  Jørn Riel vit aujourd'hui en Malaisie, histoire de décongeler, se plaît­il à dire. Mais derrière la boutade se cache quelque chose de plus fondamental. "J'aime la nature, quand il y en a assez, les étendues de glace de l'Arctique et la jungle tropicale ". Cette nature, et les hommes qui, la vivent encore, Jørn Riel va maintenant les retrouver, quelques mois chaque année, parmi les Papous de l'Irian Barat en Nouvelle Guinée qui vivent encore à l'âge de pierre, et n'avaient jamais vu d'hommes blancs avant lui.

 

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